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vendredi 9 novembre 2012

Prière sans conscience.. n'est que vide pour l'âme

Lorsque nous cherchons à cerner les caractéristiques de la civilisation occidentale moderne au regard de la tradition biblique, nous pouvons constater que nous vivons dans un monde qui a évacué le regard contemplatif. Notre civilisation se trouve enfermée dans les logiques du sens technico-pratique et du sens scientifique soumettant ainsi le développement de l’esprit aux limitations du matérialisme et du rationalisme.

Une chose est de prendre conscience des limites ou contraintes qu’imposent à chacun les faiblesses d’une culture. Une autre est de trouver le remède qui restaure l’homme dans sa dimension ontologique. Une fois encore, l’enfant nous ouvre des pistes…car il semble que sa nature possède d’elle-même l’état d’esprit métaphysique que l’on retrouve chez tous les grands personnages de la Bible.


Cependant, ces traits spirituels de l’enfant peuvent s’altérer jusqu’à disparaître, si l’on ne lui permet pas de suivre la direction que ses énergies lui inspirent, en lui offrant l’environnement adéquat.

Nous courons en effet le risque, sans nous en apercevoir, de transmettre aux enfants une vie religieuse toute empreinte de matérialisme ou de rationalisme scientifique là où seul l’esprit de contemplation peut venir combler leur soif d’absolu.

La conscience peut prendre des directions différentes selon qu’elle se développe suivant les normes internes du sens pratique (matière), de la culture scientifique (intellect) ou de l’esprit de contemplation (esprit). Ces trois dynamiques d’appréhension du monde peuvent conduire à des niveaux de lecture du réel foncièrement différents. Une montagne sera ainsi regardée différemment par un professeur de ski, un géologue ou un ermite. Or, si l’on y fait attention, l’état d’esprit d’un enfant de moins de 5 ans sera plus proche de celui de l’ermite au regard contemplatif.

L’esprit pratique recherche la satisfaction immédiate. Il jauge la quantité l’efficacité et le rendement. L’esprit scientifique cherche à dégager les lois en différenciant et comparant ce qu’il induit de la réalité. Moins intéressé par son activité propre, il court néanmoins le risque de rester centré sur ses découvertes sans parvenir à s’émerveiller de ce qui le dépasse. Certains scientifiques sont matérialistes… D’autres deviennent contemplatifs car ceux-là savent s’incliner devant l’Infini.

Toutes les grandes figures bibliques et les grands auteurs de l’histoire sainte (peu importe leurs chutes ou leur limites) partagent ce trait commun : une attitude théocentrique qui libère leur « moi » de toute tentation individualiste ou communautariste. Leur vie est celle de l’esprit qui par cette radicale ouverture au Tout-Autre fait grandir leur conscience. La Bible restera ainsi toujours, avant tout, une école de contemplation.
Lorsque nous souhaitons aider les plus petits à développer le sens de l’esprit, nous devons rester attentifs au poids culturel que nous portons. Dans notre civilisation occidentale, nous courrons toujours le risque de voir nos enfants manquer cette cible contemplative en raison des logiques décrites précédemment.

A tel enfant à qui on demande pourquoi il prie Dieu on peut facilement imaginer trois types de réponse qui correspondent aux trois états de conscience (matérialiste, scientifique et contemplatif).

Réponse 1 : « Pour obtenir de bonnes notes en classe »
Réponse 2 : « Parce que je veux tout comprendre dans le monde »
Réponse 3 : « J’aime lui parler. Il me parle. Je ne peux vivre sans penser à lui »

« Prière sans conscience… n’est que vide pour l’âme »…Nous comprenons que la troisième attitude est celle de l’esprit contemplatif. Les deux premières attitudes peuvent être observées d’avantage chez des enfants au-delà de cinq ans. Les plus jeunes, lorsque l’environnement est favorable, s’expriment d’avantage comme la « Réponse 3 ».
Nous avons tendance à enseigner les enfants selon les modalités qui contribuent à engendrer les réponses 1 et 2. Nous contraignons par exemple l’enfant à prier pour « obtenir la vie éternelle ». Or, cet aspect pratique et futur des choses n’a pas de « prise » sur lui car, comme le contemplatif, son regard se fixe sur un continuel présent. Nous lui proposons par ailleurs des explications scientifiques (causalité), alors que son esprit en réalité confond très souvent l’effet et la cause…

Mais, lorsque qu’avec lui nous disons ou chantons : «Nous te louons, nous te bénissons, nous t’adorons… », l’enfant trouve son bonheur car son âme aime se confier à ce qui le dépasse sans calcul. Le temps viendra où, adolescent confirmé dans la vie, son intelligence pourra cheminer à travers les innombrables sentiers du réel. Mais, son âme ne survivra à ces pèlerinages que si elle a développé la pleine conscience de n’être humaine que parce que contemplative….

Si nous voulons déjouer les déviations de notre civilisation occidentale, il nous faut renouer avec une Liturgie (dont les gestes nous apprennent à développer l’homme intérieur), avec les grands textes sacrés de la Bible et une vie contemplative théocentrique comme nous l’enseigne la tradition psalmique. C’est en se développant dans ce milieu favorable que l’enfant pourra goûter aux joies de la prière sans risquer de tomber dans les dangers d’une vie spirituelle faite d’automatismes.

dimanche 22 avril 2012

Catéchèse mystagogique de Benoît XVI pour la Vigile Pascale

Lors de la Vigile Pascale Benoît XVI nous a offert une magnifique catéchèse mystagogique et cosmique pour évoquer les grands symboles de cette sainte nuit. En voici le cœur pour les plus petits et les plus grands. On y retrouve les mêmes thèmes que dans la catéchèse du Bon Berger.


"Une nouvelle dimension s’est ouverte pour l’homme. La création est devenue plus grande et plus vaste. Pâques est le jour d’une nouvelle création, c’est la raison pour laquelle en ce jour l’Église commence la liturgie par l’ancienne création, afin que nous apprenions à bien comprendre la nouvelle. C’est pourquoi, au début de la Liturgie de la Parole durant la Vigile pascale, il y a le récit de la création du monde. En relation à cela, deux choses sont particulièrement importantes dans le contexte de la liturgie de ce jour. En premier lieu, la création est présentée comme un tout dont fait partie le phénomène du temps. Les sept jours sont une image d’une totalité qui se déroule dans le temps. Ils sont ordonnés en vue du septième jour, le jour de la liberté de toutes les créatures pour Dieu et des unes pour les autres. La création est donc orientée vers la communion entre Dieu et la créature ; elle existe afin qu’il y ait un espace de réponse à la grande gloire de Dieu, une rencontre d’amour et de liberté. En second lieu, durant la Vigile pascale, du récit de la création, l’Église écoute surtout la première phrase : « Dieu dit : ‘Que la lumière soit’ ! » (Gen 1, 3). Le récit de la création, d’une façon symbolique, commence par la création de la lumière. Le soleil et la lune sont créés seulement le quatrième jour. Le récit de la création les appelle sources de lumière, que Dieu a placées dans le firmament du ciel. Ainsi il leur ôte consciemment le caractère divin que les grandes religions leur avaient attribué. Non, ce ne sont en rien des dieux. Ce sont des corps lumineux, créés par l’unique Dieu. Ils sont en revanche précédés de la lumière par laquelle la gloire de Dieu se reflète dans la nature de l’être qui est créé.
Qu’entend par là le récit de la création ? La lumière rend possible la vie. Elle rend possible la rencontre. Elle rend possible la communication. Elle rend possible la connaissance, l’accès à la réalité, à la vérité. Et en rendant possible la connaissance, elle rend possible la liberté et le progrès. Le mal se cache. La lumière par conséquent est aussi une expression du bien qui est luminosité et créé la luminosité. C’est le jour dans lequel nous pouvons œuvrer. Le fait que Dieu ait créé la lumière signifie que Dieu a créé le monde comme lieu de connaissance et de vérité, lieu de rencontre et de liberté, lieu du bien et de l’amour. La matière première du monde est bonne, l’être même est bon. Et le mal ne provient pas de l’être qui est créé par Dieu, mais existe en vertu de la négation. C’est le « non ».
A Pâques, au matin du premier jour de la semaine, Dieu a dit de nouveau : « Que la lumière soit ! ». Auparavant il y avait eu la nuit du Mont des Oliviers, l’éclipse solaire de la passion et de la mort de Jésus, la nuit du sépulcre. Mais désormais c’est de nouveau le premier jour - la création recommence entièrement nouvelle. « Que la lumière soit ! », dit Dieu, « et la lumière fut ». Jésus se lève du tombeau. La vie est plus forte que la mort. Le bien est plus fort que le mal. L’amour est plus fort que la haine. La vérité est plus forte que le mensonge. L’obscurité des jours passés est dissipée au moment où Jésus ressuscite du tombeau et devient, lui-même, pure lumière de Dieu. Ceci, toutefois, ne se réfère pas seulement à lui ni à l’obscurité de ces jours. Avec la résurrection de Jésus, la lumière elle-même est créée de façon nouvelle. Il nous attire tous derrière lui dans la nouvelle vie de la résurrection et vainc toute forme d’obscurité. Il est le nouveau jour de Dieu, qui vaut pour nous tous.
Mais comment cela peut-il arriver ? Comment tout cela peut-il parvenir jusqu’à nous de façon que cela ne reste pas seulement parole, mais devienne une réalité dans laquelle nous sommes impliqués ? Par le sacrement du Baptême et la profession de foi, le Seigneur a construit un pont vers nous, par lequel le nouveau jour vient à nous. Dans le Baptême, le Seigneur dit à celui qui le reçoit : Fiat lux - que la lumière soit. Le nouveau jour, le jour de la vie indestructible vient aussi à nous. Le Christ te prend par la main. Désormais tu seras soutenu par lui et tu entreras ainsi dans la lumière, dans la vraie vie. Pour cette raison, l’Église primitive a appelé le Baptême « photismos » - illumination.
Pourquoi ? L’obscurité vraiment menaçante pour l’homme est le fait que lui, en vérité, est capable de voir et de rechercher les choses tangibles, matérielles, mais il ne voit pas où va le monde et d’où il vient. Où va notre vie elle-même. Ce qu’est le bien et ce qu’est le mal. L’obscurité sur Dieu et sur les valeurs sont la vraie menace pour notre existence et pour le monde en général. Si Dieu et les valeurs, la différence entre le bien et le mal restent dans l’obscurité, alors toutes les autres illuminations, qui nous donnent un pouvoir aussi incroyable, ne sont pas seulement des progrès, mais en même temps elles sont aussi des menaces qui mettent en péril nous et le monde. Aujourd’hui nous pouvons illuminer nos villes d’une façon tellement éblouissante que les étoiles du ciel ne sont plus visibles. N’est-ce pas une image de la problématique du fait que nous soyons illuminés ? Sur les choses matérielles nous savons et nous pouvons incroyablement beaucoup, mais ce qui va au-delà de cela, Dieu et le bien, nous ne réussissons plus à l’identifier. C’est pourquoi, c’est la foi qui nous montre la lumière de Dieu, la véritable illumination, elle est une irruption de la lumière de Dieu dans notre monde, une ouverture de nos yeux à la vraie lumière
Chers amis, je voudrais enfin ajouter encore une pensée sur la lumière et sur l’illumination. Durant la Vigile pascale, la nuit de la nouvelle création, l’Église présente le mystère de la lumière avec un symbole tout à fait particulier et très humble : le cierge pascal. C’est une lumière qui vit en vertu du sacrifice. Le cierge illumine en se consumant lui-même. Il donne la lumière en se donnant lui-même. Ainsi il représente d’une façon merveilleuse le mystère pascal du Christ qui se donne lui-même et ainsi donne la grande lumière. En second lieu, nous pouvons réfléchir sur le fait que la lumière du cierge est du feu. Le feu est une force qui modèle le monde, un pouvoir qui transforme. Et le feu donne la chaleur. Là encore le mystère du Christ se rend à nouveau visible. Le Christ, la lumière est feu, il est la flamme qui brûle le mal transformant ainsi le monde et nous-mêmes. « Qui est près de moi est près du feu », exprime une parole de Jésus transmise par Origène. Et ce feu est en même temps chaleur, non une lumière froide, mais une lumière dans laquelle se rencontrent la chaleur et la bonté de Dieu.
Le grand hymne de l’Exultet, que le diacre chante au début de la liturgie pascale, nous fait encore remarquer d’une façon très discrète un autre aspect. Il rappelle que ce produit, la cire, est dû en premier lieu au travail des abeilles. Ainsi entre en jeu la création tout entière. Dans la cire, la création devient porteuse de lumière. Mais, selon la pensée des Pères, il y a aussi une allusion implicite à l’Église. La coopération de la communauté vivante des fidèles dans l’Église est presque semblable à l’œuvre des abeilles. Elle construit la communauté de la lumière. Nous pouvons ainsi voir dans la cire un rappel fait à nous-mêmes et à notre communion dans la communauté de l’Église, qu’elle existe afin que la lumière du Christ puisse illuminer le monde.
Prions le Seigneur à présent de nous faire expérimenter la joie de sa lumière, et prions-le, afin que nous-mêmes nous devenions des porteurs de sa lumière, pour qu’à travers l’Église la splendeur du visage du Christ entre dans le monde (cf. LG 1). Amen".

Source: Vatican